8.7.10

+ froid que la mort

"avec un tel sujet on ne pouvait tourner qu'une superproduction”, dixit Christopher Nolan à propos d'Inception. Je dirais plutôt : avec un tel sujet on ne pouvait pas tourner de superproduction. Là réside le talent infini du cinéaste : faire financer et réaliser à coups de millions de dollars une œuvre cérébrale et imbitable explorant les circonvolutions du cerveau et les mécanismes de la pensée. Chapeau bas. Il a déguisé ce thriller mental en film d'action —Matrix sans le décorum futuriste —, avec des poursuites, des fusillades, des explosions à tout bout de champ, totalement inexplicables pour moi (qui tire sur les héros ?), en y faisant figurer des stars telles que Leonardo DiCaprio et Marion Cotillard. Sorti de la prouesse financière et technique, ce casse-tête chinois qui dure des plombes est mille fois plus opaque que Crime auquel certains ont reproché son hermétisme. Pour moi c'est un gros digest du vieux Au-delà du réel de Ken Russell, de Paycheck de John Woo (pour l'esthétique "businessman futuriste"), de Mr. Nobody de Van Dormael (exploration des possibles) et de The Fountain de Aronofsky. A part Solaris de Tarkovski, qui avait une dimension sensible et mystique (quasi écologique) ou Le Miroir du même, une troublante plongée dans les souvenirs, je ne vois pas d'autres films mentaux aussi embrouillés qui aient pu me séduire. Certains disent que le film s'inspire aussi de Paprika de Satoshi Kon, qui est effectivement une histoire sur les rêves et leur manipulation de l'intérieur (et qui m'avait également beaucoup ennuyé). Inception, œuvre intensément technologique où la part humaine et réelle est infime (elle se réduit à cela : le héros regrette d'avoir indirectement poussé sa femme au suicide et veut revoir ses enfants ; un autre personnage apprend qu'il doit gérer sa fortune en se libérant de l'influence paternelle), doit énormément aux possibilités de manipulation de l'image par ordinateur. A la limite ce n'est plus que de l'image pliable et repliable à l'infini. Il y a également le rôle énorme (source de Matrix également) des jeux vidéos dans ce type de récit-pousuite où on passe son temps à se canarder sans savoir pourquoi, juste pour décharger son adrénaline. Peut-être que je ne comprendrai jamais ce genre de films. Je n'y vois que de la surface, des jeux de miroirs et des niveaux de réalité interchangeables. A la limite, l' Inception réussi c'est la pub Dior de Lynch avec également Marion Cotillard, où Lynch déploie à peu près la même esthétique guindée et les mêmes décors urbains, mais avec infiniment plus de glamour. Nolan est plus froid que la mort. Je lui souhaite bien du succès (enfin je ne pense pas, ou alors je suis vraiment très largué)
P.S. Nolan a obtenu une chose rarissime grâce au méga succès de The Dark Knight : une carte blanche, qui lui a permis de tourner ce qu'il voulait : un rubik's cube d'action aux décors luxueux filmé partout dans le monde. Nolan a aussi pu se permettre cette expérience parce qu'il préparait derrière un troisième Batman, qui pourra racheter l'échec public inévitable d'Inception
P.P.S. Les critiques anglo-saxons sont aussi enthousiastes (pour l'instant) sur Inception qu'ils ont massacré Le Dernier maître de l'air. Je sens qu'en France ça prend le même chemin. Bref, je ne suis vraiment pas dans le coup. Comme d'hab. Lol

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